Overblog
Editer la page Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
/ / /

Il était un jour, il était une terre. Sur cette terre, une petite fille qui pleure. Fort. Ses larmes qui percent la terre sont salées de colère, tristesse, désespoir peut-être. Pourquoi elle pleure, on ne sait pas. Peut-être pour une broutille mais peut-être pas. Ses larmes frappent et courent dans la terre, ses larmes dessinent comme des galeries de misère. Ses mains aussi frappent, et roulent et tordent la terre. Et puis petit à petit avec ses deux mains d'enfant triste et forte, elle façonne une puis deux poupées. Elle leur fait des bras et des jambes, une tête, des yeux et oreilles. Sur cette terre qu'elle a abreuvée de ses larmes et de ses espérances, elle leur dessine un drôle de sourire.

Et puis d'un coup, elle les prend, elle court et elle les jette dans le feu. Quand elles ont bien brûlé, la petite fille les sort du feu avec un grand bâton noir. Elle se penche sur elles et souffle souffle pour les faire refroidir. Et elle leur dit : « Puissiez-vous défendre la justice ».

Elle les regarde longuement, les deux petites poupées de terre au drôle de sourire, elle les prend et les cache sous une pierre.

Quand la nuit vient, les poupées sont toujours là. Quand la lune arrive, les poupées ne sont plus là. Elles se lèvent et s'en vont découvrir le monde.

La première poupée roule et cabriole depuis le haut de la colline. Rouleroule rouleroule

Ho, elle a tant roulé cabriolé qu'elle a buté contre un caillou. Hélas, ce n'est pas un caillou, c'est un loup qui n'est pas content du tout.

« Poupée de terre, terre de misère, que fais-tu donc sur mon chemin ?

- Monsieur le loup, je vais de par le monde défendre la justice

- Défendre la justice, tu me fais bien rire ! Mais si tu ne me donnes rien, tu ne passeras pas. Tu n'as pas besoin de deux bras pour défendre la justice ! »

Et d'un coup de croc, le loup lui tranche un bras.

La poupée recommence à rouler cabrioler. Rouleroule Rouleroule

Elle a tant roulé cabriolé que, folle/aveugle qu'elle est, elle a heurté... le loup.

« haha, encore toi ?!

- Monsieur le loup, laisse-moi passer, je vais de par le monde défendre la justice

- Pour passer, tu donneras un bras. Pas besoin de bras pour défendre la justice. Tes jambes suffiront »

Et d'un coup de croc, le loup lui tranche son deuxième bras.

Cahin-caha, bonant-malant, la poupée recommence à rouler cabrioler. Rouleroule Rouleroule

Elle a tant roulé cabriolé que, folle qu'elle est, de nouveau face à elle, elle trouve... le loup.

« Monsieur le loup, laisse-moi passer, je vais de par le monde défendre la justice

- Pour passer, tu donneras une jambe. Pour défendre la justice, une seule te suffira »

Et d'un coup de croc, le loup tranche sa jambe.

Cahin-caha, bonant-malant, la poupée recommence à rouler cabrioler. Rouleroule Rouleroule

Elle a tant roulé cabriolé que... voilà de nouveau le loup.

« Monsieur le loup, laisse-moi passer, je vais de par le monde défendre la justice

- Pour passer, tu donneras ta deuxième jambe. Qu'as-tu besoin de jambes ou de bras quand on a le courage/bon droit pour soi ? »

Et malgré les suppliques de la poupée, le loup a croqué la deuxième jambe.

Sans ses bras, sans ses jambes, la poupée est devenue petite si petite avec juste ses yeux pour pleurer. Elle est tombée dans un fossé et n'a pas pu se relever. S'en est fini de courir le monde.

Mais la deuxième poupée est restée en haut de la colline et elle a vu ça. Elle est allée près du feu chercher un couteau pointu et s'en est allée elle aussi découvrir le monde.

La deuxième poupée roule et cabriole depuis le haut de la colline. Rouleroule rouleroule

Ho, elle aussi elle a tant roulé cabriolé qu'elle a buté contre... le loup.

« Poupée de terre, terre de misère, que fais-tu donc sur mon chemin ?

- Monsieur le loup, je vais de par le monde défendre la justice

- hoho, je crois que j'ai déjà entendu ça ! Si tu ne me donnes pas une de tes mains, je te barrerai le chemin !

- Pour barrer le chemin, le loup, tu n'as pas besoin de tes pattes ! »

Et d'un seul coup de couteau, la deuxième poupée tranche les quatre pattes du loup – et sa queue.

Le loup n'a pas le temps de dire ouf tellement il est surpris, il dégringole au fond d'un fossé et il y est resté.

Alors la deuxième poupée a ramassé les pattes du loup. Elle a rejoint sa sœur, petite si petite et si faible. Elle a recueilli ses pleurs et avec eux elle a raccommodé les pattes sur ses bras et ses jambes coupés.

Comment croyez-vous que l'histoire s'acheva ? La poupée aux bras et jambes de loup a-t-elle conservé sa douceur et bercé sa sœur ou, devenue dure et cassante, l'a-t-elle dévorée ?

Seuls ceux à qui un loup a coupé les mains connaissent la réponse.

Partager cette page
Repost0
Published by lolo chocolat - dans Contes

Cékoiceblog?

  • : Le blog de lau, conteuse
  • : invitation aux histoires en rencontrant Laurence, conteuse, et son travail sur le développement durable, les gâteaux au chocolat et autres mignardises à oreilles et à yeux
  • Contact

Répertoire